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TRAVAILLER À LA RÉSILIENCE ET À LA DÉCARBONISATION DES BÂTIMENTS

Forum mondial sur le bâtiment et le climat à Paris, France

 Le forum mondial sur les bâtiments et le climat s’est tenu pour la première fois de son histoire en France, à Paris, du 07 au 08 mars sous l’égide du Programme des Nations Unies pour l’Environnement, PNUE et le gouvernement français. Plus de 1800 acteurs et professionnels du bâtiments ont répondu à l’invitation de Paris. Des ministres, des élus, des parlementaires, des acteurs clés du secteur du bâtiment, des organisations professionnelles et des représentants d’organisations internationales se sont réunis pour se pencher sur le rôle et la responsabilité des bâtiments dans le réchauffement climatique.

 La réduction des émissions de gaz à effet de serres des bâtiments représente « un tiers de l’effort total nécessaire pour être en ligne avec le scenario de développement durable de l’Agence internationale de l’énergie », selon Global ABC, l’Alliance mondiale pour les bâtiments et la construction.

Le secteur du bâtiment est responsable actuellement de 21% des émissions totales de gaz à effet de serres dans le monde. Le parc immobilier représentait en 2022, 34% de la consommation finale d’énergie, selon Global ABC. Cette énergie est destinée simplement à chauffer, climatiser ou illuminer des bâtiments créant derrière ce besoin d’innombrables dégâts sur l’environnement. La construction des bâtiments est loin de tenir en compte les aspects écologiques et environnementaux. La fabrication ou la construction du ciment engendre de forts impacts sur le climat. Le ciment, l’un des éléments majeurs de la construction, est un produit très émetteur. Comme l’acier et l’aluminium qui génère autant de CO2.

 Ces matériaux de constructions sont difficiles à décarboner et à rendre propre. Les promoteurs immobiliers peinent à trouver des solutions pour remplacer le ciment, l’aluminium et l’acier dans la construction. Pourtant des alternatives écoconstructions existent, mais séduisent moins.

 Des terres cuites, le bambou ou le bois sont les plus sollicités dans les constructions actuelles et appellent à d’énormes efforts pour se libérer du ciment et de ses dérivés. La rénovation des maisons permet aussi de réduire, selon les experts, à 75% des émissions de gaz carbonique.

RÉSILIENCE, ADAPTATION ET ATTÉNUATION, DÉCARBONISATION

 Lors de ce sommet, Ligia NORONHA la sous-secrétaire générale et cheffe du bureau du PNUE, Programme des Nations Unies pour l’Environnement à souligner la nécessité, « d’aligner écologie et construction » et parle concrètement des défis qui interpellent le secteur du bâtiment et de la construction pour répondre aux problèmes environnementaux et « approcher la neutralité carbone » à l’horizon 2030. Elle a insisté sur le soutient des projets innovants au bénéfice de l’environnement et des populations, la diffusion de l’enseignement et des bonnes pratiques dans la construction.

Table ronde sur le forum mondial sur le bâtiment et le climat. De gauche a droite Roland ROESCH, directeur du centre innovation et de technologie, Natalia Alonso Cano cheffe du bureau onusien en Europe et Asie centrale sur la réduction des risques de catastrophes naturelles, Christophe Béchu, ministre Français de la transition écologique et de la cohésion des territoires, Ligia Noronha sous-secrétaire générale et cheffe du bureau de New York du Programme des Nations unies pour l’environnement et Jamie Fergusson directeur mondial de l’activité climatique IFC et Banque Mondiale

 Ligia NORONHA salue les efforts des Etats et des gouvernements dans la mise en œuvre des politiques environnementales qui « facilitent la réduction du gaz à effet de serres, encourage à prendre des initiatives importantes pour protéger la nature, l’environnement et réduire considérablement les effets du réchauffement climatique ».

 Dans son allocution de bienvenue, Christophe Béchu, le ministre français de la transition écologique et de la cohésion des territoires, déclare que « la façon dont on construit et dont on habite cette planète, c’est 7% des emplois de la planète, 13% du PIB mondial et 50% de la valeur de la richesse consolidée de nos États ou de la totalité de nos acteurs ».

Il poursuit pour dire « la course dans laquelle nous sommes rentrés, la lutte contre les dérèglements climatiques et la réduction des gaz à effet de serres, il y a la fois la construction et la vie des bâtiments après construction. On parle de chiffres qui varient selon qu’on parle des émissions énergétiques, c’est 1/3 des émissions énergétique de la planète. La moitié des bâtiments qui existeront dans le monde en 2060 ne sont pas construits. Tous les 5 jours, il se construit dans le monde l’équivalent de la ville de Paris. Chaque année, c’est plus que la surface totale de tous les bâtiments du Japon qui s’ajoute au patrimoine immobilier mondial ». Et de continuer « la façon dont nous allons construire ces espaces, va impacter les modes de vie de nos concitoyens. » et d’ajouter « nous ne sommes pas ici pour faire un constat pour constater la monter de l’acidification des océans et les difficultés que nous avons par rapport aux espèces marines. Nous sommes là pour travailler. Nous devons prendre ici des solutions avec des professionnelles pour montrer qu’il y a d’ores et déjà des solutions qui existent. L’enjeu ce que nous nous séparions avec la déclaration de Chaillot, qui est le nom de notre cité de l’architecture et du patrimoine, pour rappeler ce que sont nos principes, pour décliner nos engagements et renforcer notre coopération internationale sur ces différents sujets. »

Christophe Béchu, ministre Français de la transition écologique et de la cohésion des territoires

Aujourd’hui les effets du changements climatiques impactent fortement sur la vie des populations et obligent les décideurs à prendre de nouvelles mesures d’adaptation et d’atténuation face aux changements climatiques. Les secteurs pollueurs sont ainsi identifiés pour renforcer les mesures. Jamie Fergusson, directeur mondial de l’activité climatique IFC-Banque Mondiale, reconnait les problèmes et la contrainte de convaincre les décideurs au niveau national et international. Il encourage néanmoins sur toutes les initiatives fiscales pour répondre à cette problématique du bâtiment climat et à réfléchir sur toutes les incitations.

« Il faut s’intéresser à la chaine d’approvisionnement et décarboner le ciment et l’acier. Mais il faut également penser à la question de résilience et nous devons travailler sur la résilience », déclare-t-il en substance.

 Pour la cheffe du Bureau régional des Nations Unies pour l’Europe et l’Asie centrale de la réduction des risques de catastrophe naturelles, Natalia Alonso Cano, revient sur la résilience et la durabilité des infrastructures.

« L’engagement de notre bureau pour la réduction des risques des catastrophes naturelles, c’est de trouver des solutions innovantes pour soutenir les efforts collaboratifs pour faire face aux effets de changements climatiques, mais particulièrement pour apporter des solutions de résilience. Ce forum doit être le catalyseur de ces échanges et parvenir à des résultats tangibles. Le secteur de la construction doit s’adapter aux changements climatiques. Pour cela il faut penser résilience et construire des bâtiments résilients. Nous devons mettre l’accent sur les mesures de résiliences, d’adaptation et de prévention. Nous avons toutes les bonnes raisons financières qui intègrent les risques. Notre rôle est d’identifier les vulnérabilités, avec l’appui des partenaires, et nous priorisons les améliorations à apporter et essayons de bien comprendre les interdépendances entre économie et infrastructures. Cette coopération internationale est absolument indispensable pour accélérer nos efforts et nous devons agir conjointement. Je rappelle ici une résolution des nations unies l’année dernière sur la résilience dans le cadre du développement durable ».

 Roland ROESCH est le directeur du centre d’innovation et de technologie IITC, IRENA. Il entend les revendications, les inquiétudes et les attentes. « La décarbonisation, c’est la clé de cette rencontre. Les technologies pour décarboner existent. Le secteur de la construction a besoin des technologies pour se développer et arriver aux objectifs de 2050 de réductions des gaz à effet de serres. IRENA, c’est l’agence internationale des énergies renouvelables. Avec nos membres, présents dans plus de 170 pays, nous travaillons à l’accélération de l’utilisations des énergies propres pour la réduction du réchauffement climatique. Les bâtiments doivent répondre aux appels des énergies renouvelables et s’adapter au fonctionnement et au système ».

LES ÉCOCONSTRUCTIONS EN EXPÉRIMENTATION EN AFRIQUE OCCIDENTALE

 L’Afrique est l’une des régions du globe terrestre les plus chaudes avec plus de 40 et 45 degrés dans certains endroits. Les besoins de constructions s’accélèrent et les techniques de constructions s’appuient sur le ciment et les matériaux comme l’acier et l’aluminium avec des méthodes anciennes et non écologique.

Jérôme Gasteau travaille pour le Fonds français de l’environnement mondial. Il développe avec ses partenaires des solutions inspirantes adaptées au climat et l’environnement. Il a beaucoup de projets de construction écologique en Afrique de l’Ouest. Des projets de construction bioclimatiques qui s’appuie sur des matériaux biosourcés localement. Il développe actuellement 6 projets en Afrique de l’Ouest pour réhabiliter et tester des techniques de constructions avec une empreinte écologique réduite et un bilan carbone faible qui sont adaptés au climat de ces régions. Ce sont des constructions bioclimatique, résiliente, bas carbone, abordable, Low tech et végétalisés.

« Nous avons retrouvé une très forte demande sur cette région ouest africaine avec des conditions climatiques spécifiques et de types de réflexion à mener sur les types de construction qui doivent être adapter à ce climat. Nous intervenons au Sénégal, la Mauritanie, Burkina, Benin et quelques pays sahéliens ». Pour parler de l’impact de ces projets sur les populations, il poursuit pour dire que « ce sont des projets qui ont des coûts de constructions assez limités, qui offrent des bonnes propriétés en matière thermique dans le cadre d’augmentation des températures, ce sont des systèmes de rafraichissement passif qui permettent d’avoir des habitations confortables vantillées pour pouvoir mieux supporter les chaleurs élevées. Nous avons des financements variés qui tient compte des projets innovantes pour les bénéfices des populations et le bénéfice de l’environnement ».

Jérôme Gasteau du Fonds Français pour l’environnement mondial

 En Côte d’Ivoire, pour répondre à l’urgence climatique, l’Etat ivoirien a mis en place des instruments juridiques qui intègrent les besoins de l’environnement dans le portefeuille de l’État. Kouakou Parfait Kouadio est le directeur du cabinet du ministère de l’environnement, du développement durable et de la transition écologique.

« La Côte d’Ivoire est victimes des effets de changement climatique comme certains pays africains. Nous sommes venus ici nous inspirer des bonnes pratiques. Notre pays est engagé résolument sur un développement sobre en bas carbone. Nous avons revue en hausse notre ambition climatique en essayant de réduire les émissions de gaz a effet de serres autour de 30.41% a l’horizon 2030. Aujourd’hui de nombreuses initiatives sont en cours dans le pays. Un nouveau code de l’environnement a été adopté et promulgué. Des décrets d’applications sont en cours. Une nouvelle loi sur les changements climatiques est en voie d’être adopté. Le cadre législatif, règlementaire et juridique est entrain de se développer. Pour toutes ces initiatives, nous avons besoin d’accompagnement de la communauté internationale pour accroître la capacité de nos populations, leur résilience face aux effets climatiques. Nous avons des projets environnementaux de grandes envergures qui améliorent les conditions de vie de nos populations. Nous avons besoin des financements près de 22 milliards de dollars pour mettre en œuvre notre politique environnementale en termes d’atténuation et d’adaptation au changement climatique. Des efforts sont faits au niveau interne, l’Etat va financer certains projets, mais nous avons grand besoin de la communauté internationale pour répondre à nos engagements climatiques. Ce sont des mesures qui ont besoin de financement pour leur mise en œuvre effective. L’environnement est au cœur de nos préoccupations. L’Etat ivoirien prend en compte les défis environnementaux, nous avons des stratégies que nous voulons mettre en œuvre à travers le renforcement des capacités de nos acteurs locaux et nationaux ».

Kouakou Parfait Kouadio est le directeur du cabinet du ministère de l’environnement, du développement durable et de la transition écologique.

 Au cours de ce Forum, les participants (maires, ingénieurs, urbanistes, bureaux d’études, gouverneurs, ministres, entreprises de constructions, organisations professionnelles, organisations internationales, élus, parlementaires) doivent montrer que l’usage des matériaux objets sourcés, l’appui des énergies renouvelables, les modes de constructions, les occupations de l’espace et les bonnes pratiques existent et qu’il faut aller les chercher dans l’intérêt du climat et de l’environnement. « S’inspirer des bonnes pratiques permet de préserver la durabilité et les ressources de la planète », selon le Ministre Christophe Béchu.

 Le Benchmark et le partage des initiatives permettent d’enclencher une véritable réforme dans le secteur du bâtiment et de la construction, de changer les modes de construction et de tenir en compte des effets climatiques dans la vie des populations. Avoir des bâtiments bien sourcés et résilients, rénover et revoir l’efficacité des matériaux dans la construction, c’est l’intérêt de cette rencontre internationale qui doit tenir compte de la durabilité des bâtiments et des aspects écologiques.

 L’objectif principal de ce Forum, faut-il le rappeler, était de réunir les acteurs clés du bâtiment et de la construction ainsi que les décideurs pour prendre des mesures importantes afin de répondre aux enjeux de la décarbonisation, de la résilience et de la transition du secteur du bâtiment et du climat. Avec l’ensembles des acteurs de la chaine de valeur, après deux jours d’intenses travaux, les participant s’engagent à renforcer les cadres de dialogue, de mobiliser les financements et de partager les solutions qui existent dans le monde entier au service de la mise en œuvre de l’Accord de Paris sur le climat, pour un secteur qui représente 21% des émissions des gaz a effet de serres et 55% de la richesse mondiale.

 Parmi les grands engagements du Forum de Paris sur le bâtiment et le climat, il y a la mise en œuvre des feuilles de route, des cadres réglementaires et des codes de la construction et de l’énergie contraignants afin de tendre vers des bâtiments plus neutres en carbone, il y a également la mise en œuvre d’un cadre financier adapté avec des incitations financières, fiscales, et des outils règlementaires afin d’augmenter la part des bâtiments résilients, quasi nuls en émissions de gaz a effet de serre et accessibles. Ensuite les participants s’engagent à promouvoir l’adoption de labels, de standards et de certifications, promouvoir la production, le développement et l’utilisation de matériaux de construction faibles en carbone, durables et à coût limité. Enfin, promouvoir les chaines de valeur collaboratives et la recherche, ainsi que le développement des solutions innovantes, améliorer les compétences en renforçant notamment le savoir-faire local prenant en compte les stratégies d’atténuation et d’adaptation au changement climatique.

Plus de 70 Etats s’engagent au respect de ces différentes mesures issues de ce forum. Mais par contre, les signataires de « la déclaration de Chaillot » soulignent un volume encore trop insuffisant de rénovation et de construction de bâtiments durables. Ce qui accentue le fossé entre la trajectoire du secteur et l’objectif de l’accord de Paris de maintien du réchauffement climatique en dessous de la barre des 1,5 degrés Celsius d’ici 20100. Ils dénoncent tous la poursuite des investissements dans des systèmes et des bâtiments à trop forte intensité carbone et la surexploitation des ressources naturelles pour la production des matériaux de construction, facteur de dégradation de la biodiversité et de l’environnement.

Pour une bonne gestion des problèmes climatiques et environnementaux, tous les acteurs doivent s’accorder sur le respect des engagements et instruments internationaux ratifiés à l’occasion des rencontres et forum internationaux. Les pays développés ont tendances de monopoliser la parole quand il s’agit de décider sur des questions environnementales et climatiques. Pourtant les plus grands pollueurs et les moins payeurs sont issus des pays développés. Les pays du Sud sont souvent défavorisés dans les négociations internationales. La question de la décarbonisation des industries et des bâtiments rentrent en jeu et vient s’ajouter à longue liste des instruments de l’occident. Pour l’atteinte des objectifs du développement durable notamment la lutte contre les changements climatiques et leurs répercussions, il est essentiel que des discussions avec tous les acteurs soient engagés pour décider de toutes les mesures de résiliences, d’adaptation et d’atténuation face au changement climatique. L’application rigoureuses et dans son intégralité des grandes décisions internationales sur le climat par les partis signataires est la condition sine qua non de la réduction des catastrophes naturelles ou climatiques. Elles doivent faire l’objet de sanctions en cas de violation par une partie tierce. C’est ainsi que les actions et les initiatives vont se consolider autour du climat avec des avancées significatives dans la réduction des émissions de gaz à effet de serres.

REPORTAGE

MAMADOU BAH

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